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sammael world
31 mars 2015

la psychogénéalogie, thérapeutique déviante.....

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la psychogénéalogie, thérapeuthique déviante....

 LA PSYCHOGENEALOGIE

La hantise de nos arbres généalogiques

Géraldine Fabre

Docteur en Sciences, Membre de l’Observatoire Zététique

 

Extrait des actes du colloque national :« Science, pseudo-sciences et thérapeutiques déviantes »

Approche pratique et éthique (in Découvertes sur les sectes et religions n°72 –GEMPPI)
   Organisé par le GEMPPI en Partenariat avec le CEREM

Qui s’est déroulé le Samedi 21 octobre 2006 à l’Espace Ethique Méditerranéen,  Hôpital adultes de La Timone. 264, rue St Pierre 13005 Marseille  -  (www.medethique.com)

 

La psychogénéalogie peut être définie comme une méthode de psychanalyse qui consiste à rechercher dans le vécu de nos ancêtres les sources de nos comportements, de nos éventuels troubles psychologiques ou maladies. L’engouement actuel pour la généalogie contribue au développement de cette discipline qui lui devient presque indissociable. La théorie qui sous-tend cette thérapie, est issue des observations qu’Anne Ancelin Schützenberger, psychothérapeute, groupe-analyste et psychodramatiste, a réalisées au cours de sa carrière.


S’il est évident que l’éducation reçue de nos parents, les enseignements transmis par nos grands-parents, les relations avec les membres de notre famille nous influencent tout au long de notre vie, les interprétations de la psychogénéalogie, découvrant les fantômes qui « hanteraient » nos arbres généalogiques,  vont bien au-delà de ces évidences et peuvent parfois s’avérer dangereuses.

La psychogénéalogie en quelques mots

La théorie de la psychogénéalogie est basée sur différents concepts de psychanalyse, dont les principaux sont  l’inconscient collectif,  les loyautés familiales invisibles et les notions de crypte et defantômes.


Pour le psychanalyste Carl Gustav Jung, l’inconscient collectif se manifeste sous forme d’archétypes, c’est-à-dire d’images anciennes, que l’on retrouve dans les mythes et légendes, et qui seraient communes à toute l'humanité. Cette idée, qui sous-entend une certaine hérédité, a été reprise par Jacob Lévi Moreno qui, la développant, a postulée l’existence d’un co-inconscient familial ou groupal, vecteur de la transmission transgénérationnelle dans une même famille.


Le concept de loyauté familiale invisible a été développé par le psychanalyste Ivan Boszormenyi-Nagy. Pour lui, il y aurait dans chaque famille des règles de loyauté et un système de comptabilité inconscients qui fixent la place et le rôle de chaque membre et ses obligations familiales. Dans cette perspective, Anne Ancelin Schützenberger affirme que l’acquittement des dettes familiales est très souvent transgénérationnel : « Ce que nous avons reçu de nos parents, nous le rendons à nos enfants. »<!--[if !supportFootnotes]-->[1]<!--[endif]--> Ces règles de loyauté sont dites invisibles car pour les psychogénéalogistes, elles sont inconscientes. Le choix d’une profession, l’échec inconscient à un concours, le développement d’une maladie, etc. sont souvent interprétées en psychogénéalogie comme des loyautés familiales, nous maintenant en servitude.


Pour expliquer le comportement parfois incompréhensibles de certains de leurs patients, agissant de manière irrationnelle et contraire à leur volonté, Nicolas Abraham et Maria Török inventèrent les notions de crypte et de fantômes. Selon eux, un secret, un non-dit peuvent être enfermés dans unecrypte de l’inconscient familial. Ce secret peut par la suite en surgir et influencer le comportement des descendants de la famille. Un fantôme serait donc une formation de l’inconscient, né du secret inavouable d’un autre membre de la famille et qui se serait transmis d’un inconscient à l’autre à travers les générations.


Comme on le voit dans cette brève présentation, la psychogénéalogie postule l’existence d’un inconscient familial, vecteur de la transmission entre les générations, l’existence de règles de loyautés propres à chaque famille et la capacité pour un secret, un événement passé traumatisant de resurgir après plusieurs générations et d’influencer le comportement des descendants de la famille.

L’utilisation de la psychogénéalogie

Le diagnostic d’une maladie transgénérationnelle est établi par le psychogénéalogiste à partir d’un génosociogramme. Outil de base de la psychogénéalogie, c’est un arbre généalogique constitué par le patient, complété des éléments de vie importants (professions, lieux d’habitation, contexte socio-économique, etc.) et des dates d'événements marquants (naissances, mariages, décès, accidents, licenciement, maladie, etc.). Ce n’est donc pas un document objectif. Il ne se limite d’ailleurs pas à la filiation directe ; le patient peut y ajouter toutes les personnes de sa famille ayant un rôle important à ses yeux (oncles, tantes, neveux, cousins, etc.).


Dans cette représentation graphique, le psychogénéalogiste recherche les répétitions, de dates, de prénoms, de maladies, de professions, etc. et essaie ensuite de les interpréter. Pour leur donner un sens, certains psychogénéalogistes utilisent lalangue des oiseaux, « traduction » basée sur de simples procédés homophoniques. Le choix des prénoms d’un enfant est souvent considéré comme révélateur d’une transmission familiale plus ou moins consciente. Ainsi, Gisèle signifierait « gis-en-elle », René = « re-naît », Dorothée serait « dort ôté », en souvenir d’un enfant mort, Sylvie = « S’il vit », Vivien = « Vie vient », témoignant de la volonté familiale de rappeler l’absent. Ces interprétations symboliques ou purement intuitives ne sont basées que sur de simples analogies et ne sont étayées par aucune preuve scientifique. Affirmations gratuites, elles sont également invérifiables.


En recherchant dans l’histoire de la famille de ses patients, Anne Ancelin Schützenberger releva des répétitions de structure ou d’âge : le cancer de ses patients s’était en effet parfois déclenché  à la date anniversaire ou à l’âge auquel leur mère, leur grand-père, leur grand-tante étaient précédemment morts d’un cancer ou d’un accident. Ces répétitions ou synchronies constituent ce qu’elle appelle lesyndrome d’anniversaire.


En psychogénéalogie, ces coïncidences ont un sens et révèlent une loyauté familiale invisible. Selon l’exemple donné par Anne Ancelin Schützenberger, si Charles souffre d’un cancer des testicules, c’est par loyauté inconsciente envers son grand-père qui est mort, au même âge, d’un coup de pied de chameau porté à cet endroit.


Les psychogénéalogistes avancent des probabilités très faibles d’observer ces correspondances. Bien que les recherches statistiques sur les transmissions transgénérationnelles soient quasi inexistantes, mathématiquement, il est facile de démontrer que ces coïncidences peuvent tout aussi bien être hasardeuses : les probabilités de correspondance sont en effet bien supérieures à ce que les psychogénéalogistes affirment.


Sur le même principe, Salomon Sellam a défini le syndrome du gisant. Ce trouble transgénérationnel serait dû à la hantise d’un ancêtre. L’identification de ce syndrome passe par une correspondance de dates révélée par l’arbre généalogique. Chaque personne est caractérisée par trois dates : date de conception, date de naissance et point G correspondant à la date de naissance à laquelle on ajoute 9 mois. Chaque ancêtre est également caractérisé par trois dates : sa date de conception, sa date de naissance et sa date de décès. Le psychogénéalogiste diagnostiquera un syndrome du gisant si deux de ces dates coïncident. Salomon Sellam affirme que la probabilités d’observer de telles correspondances est très faible (1 une sur 365 soit 0,2%) et elle le convainc que ces coïncidences ne sont pas dues au hasard. En réalité, la probabilité de trouver une telle correspondance dans un arbre comportant 4 ancêtres est déjà de 71% ; elle monte à 95 % avec 10 ancêtres… Nous sommes donc tous potentiellement hantés par un de nos ancêtres.


Pourquoi est-ce convaincant ?

Aux premiers abords, les théories et les interprétations de la psychogénéalogie peuvent sembler très convaincantes.


Les dates utilisées sont perçues comme des données objectives et les arbres généalogiques tiennent donc lieu de démonstrations « scientifiques ». Sur les génosociogrammes, les correspondances sont facilement visualisables. Même si elles ne sont dues qu’au hasard, il est difficile de s’en rendre compte tant l’évaluation de probabilités est contre-intuitive et prend souvent notre bon sens en défaut. De plus, les psychogénéalogistes insistent sur le caractère extraordinaire de ces coïncidences. Refusant ainsi qu’elles ne soient dues qu’au hasard, ils déduisent de ces observations une intentionnalité inconsciente.


Leurs interprétations péremptoires peuvent également sembler logiques et cohérentes. Elles sont facilement compréhensibles, basées la plupart du temps sur des analogies (langue des oiseaux). Mais elles sont surtout invérifiables et irréfutables et il faut les admettre pour pourvoir « guérir ».


Les psychogénéalogistes observent des répétitions de structures, des coïncidences de dates et déduisent de ces corrélations des causalités. C’est une erreur de raisonnement que nous commettons tous au quotidien. Mais, constater une corrélation temporelle entre deux événements, une coïncidence de dates entre deux personnes est-ce suffisant pour affirmer qu’un des événements a impliqué l’autre, que ces deux personnes sont liées ? Non. Constater que Charles et son grand-père ont tous les deux été atteints, au même âge, aux testicules ne permet pas d’affirmer que Charles développe un cancer à cause du coup de pied du chameau reçu par son grand-père.


Est-ce que ça « marche » ?

Les psychogénéalogistes prétendent que la mise en lumière d’une loyauté familiale invisible suffit à permettre au patient de sortir du schéma de répétition et donc à le « guérir » de sa maladie transgénérationnelle. Ils revendiquent donc de nombreuses « guérisons ».


Cet argument d’efficacité est souvent avancé pour valider la théorie qui sous-tend une thérapeutique mais il constitue une faute de logique, appelé aussi le sophisme du pragmatisme. En effet, il ne suffit pas que Charles ait guéri de son cancer pour prouver que celui-ci était dû au coup de pied de chameau reçu par son grand-père.


Les nombreuses « guérisons » avancées comme preuves de l’existence de ces transmissions transgénérationnelles ne constituent en réalité qu’une collection d’arbres et de témoignages. Ils peuvent de plus résulter d’un tri sélectif des données, seuls les résultats probants étant mis en avant. Sans autre preuve, les théories de la psychogénéalogie ne sont que des hypothèses restant à confirmer. Un exemple ne démontre rien. Une observation peut mettre en évidence un phénomène, (synchronie, syndrome du gisant), mais son interprétation par une mémoire transgénérationnelle inconsciente n'est qu'une hypothèse que cette simple observation ne suffit à prouver.


Pourquoi est ce que ça marche ?

La principale qualité d’un psychogénéalogiste est certainement l’écoute attentive qu’il se doit d’accorder à ses patients. En effet, les patients doivent confier à leur thérapeute leur histoire et celle de leurs familles. Le contexte de la maladie, du trouble psychologique qui les ont amenés à consulter est donc pris en compte. Aucun détail n’est oublié puisque tout a un sens.


Mais ce qui contribue au succès de la psychogénéalogie est sans aucun doute les réponses qu’elle prétend apporter. Les interprétations des psychogénéalogistes répondent à une véritable quête de sens de la part de leurs patients. Frappé par la maladie, ils ont en effet besoin de comprendrepourquoi : pourquoi est-ce que cette maladie les touche ? Pourquoi cela leur arrive-t-il maintenant ? Aucun médecin n’est capable de répondre à ces interrogations alors que la psychogénéalogie donne des explications en apparence cohérentes et rationnelles, mais surtout invérifiables et probablement libératrices. 


Enfin, en rejetant la faute de la maladie ou du mal-être sur un autre membre de la famille, la psychogénéalogie déculpabilise et déresponsabilise le patient. Cet effet de « déculpabilisation » joue très vraisemblablement un rôle dans les améliorations ressenties par les patients des psychogénéalogistes.


Pourquoi est ce dangereux ?

Bien qu’elle revendique une certaine efficacité, la psychogénéalogie n’est pas une psychothérapie inoffensive. 


Prétendant faire ressortir de l’inconscient familial des souvenirs refoulés à l’origine de problèmes psychologiques, la psychogénéalogie glisse parfois vers la manipulation par suggestion. Comme d’autres thérapies du même type, elle amène le patient à croire fermement à la véracité de faux souvenirs induits et aux explications invérifiables données par la thérapie.


Rejetant la « faute », la cause de la maladie sur un autre membre de la famille, elle peut également être la source de conflits et de rupture familiale. Si elle déculpabilise le patient, elle rejette en effet la culpabilité sur un de ses proches dont le comportement serait à l’origine de sa propre maladie.


De plus, cette thérapie enferme le patient dans son propre schéma de raisonnement. La maladie transgénérationnelle diagnostiquée, le patient se doit en effet de continuer la thérapie pour en sortir afin d’éviter de transmettre à son tour la maladie à sa descendance.


Enfin, les interprétations de certains psychogénéalogistes sont plus que douteuses. Les transmissions transgénérationnelles sont pour eux la source de toutes les maladies, même celles d’origine génétique comme l’écrit Baudouin Labrique :


Les maladies dites génétiques sont en fait des somatisations de conflits non résolus pouvant remonter jusqu'à la quatrième génération dans la famille.”

 

Bibliographie

Broch H., (1985), Le paranormal, Seuil. 
Canault N. (1998), Comment paye-t-on les fautes de ses ancêtres ? , Desclée De Brouwer.
Ancelin Schützenberger A., (2000), Aie, mes aieux ! , 15e édition, Desclée De Brouwer.
Van Eersel P. et Maillard C., (2002), J’ai mal à mes ancêtres, Albin Michel.
Sellam S. (2004), Le syndrome du Gisant, un subtil enfant de remplacement, Bérangel.


Fabre G. (2005), Psychogénéalogie (I) – Aïe, mes aïeux !. Publié sur le site de l’Observatoire Zététique et disponible en ligne : http://www.observatoire-zetetique.org


Fabre G. (2006), Psychogénéalogie (II) - Le syndrome du Gisant. Publié sur le site de l’Observatoire Zététique et disponible en ligne :http://www.observatoire-zetetique.org

 

GEMPPI:groupe d'etudes des mouvements de pensée en vue de la prévention de l'individu 

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